PETIT JOURNAL DE 1684 A ESCOUSSENS D’APRES CE QUI RESTE DU REGISTRE DU NOTAIRE TRILHE POUR LES SIX PREMIERS MOIS DE L’ANNEE,

 

 

PAR JEAN N.D. ESCANDE

HABITANT, TROIS CENT ANS APRES LE CHÂTEAU DUDIT LIEU

 

Le registre du notaire Trilhe pour Escoussens en 1684 est tenu du 5 janvier au 9 juillet, du moins c’est tout ce que j’en ai retrouvé. Soit 31 actes en six mois, ou cinq par mois, ce qui n’est pas mal pour un village qui compte alors de sept à huit cents habitants. On sait que depuis Charles VII, Escoussens est propriété des Chartreux de Castres. Ceux-ci n’y viennent pas souvent : cette année 1684, le syndic des Chartreux, c’est-à-dire le frère chargé des affaires temporelles de l’abbaye, est Octavien de Creil. Il peut se réclamer d’une parenté nombreuse et connue dans le Valois et le Beauvaisis ; mais comment est-il venu chez nous?

Dans la généalogie de l’habitante actuelle du château, Christine de Hédouville, peintre, on trouve des renseignements sur la famille, éteinte, de Creil. Au début du XVIIe siècle, les deux frères de Hédouville, François (1573-1641) et Louis (1587-1635) avaient épousé à Révillon deux sœurs: Nicole et Madeleine de Creil. Christine est une très lointaine descendante de François, et ce n’est pas une des moindres curiosités du château qu’elle y ait retrouvé la trace de ce lointain arrière-grand-oncle, car les souvenirs des Creil, qui appartenaient aux Hédouville, ont été complètement détruits dans les tranchées des environs de Laon, pendant la guerre de 1914-1918.

Ces Creil étaient d’ailleurs éclectiques : sous Louis XIV, une Marie de Creil épouse un célèbre acteur de la Comédie Italienne, Trivelin, dont le vrai nom est Domenico Locatelli. Ca a du faire un beau tapage dans cette famille toute adonnée à la piété, cette alliance avec un excommunié, comme l’ont été les acteurs jusqu’à la Révolution ; et italien, en plus... Enfin, cette même année 1684, l’Intendant de Moulins, Jean de Creil (1631-1697) a un fils qui sera Intendant de Metz toute la première moitié du XVIIIe siècle. Les armes des Creil devaient les porter à la vie ecclésiastique, car elles représentaient sur fond d’azur, un chevron d’or flanqué des trois clous de la Passion.

Du reste Octavien de Creil n’est présent que dans quatre actes. En 1684, nous sommes en guerre contre l’Espagne ; et Louis XIV révoque l’Edit de Nantes donné aux protestants par son grand-père Henri IV. Le Marquis de Dangeau commence à écrire sur le Roi et sa cour son journal, que Saint-Simon trouvera fade à faire vomir, tout en le démarquant impudemment. La Bruyère écrit ses Caractères et Fontenelle réfléchit sur les chances qu’ont d’autres planètes d’être habitées par des animaux au moins aussi intelligents que les humains : elles sont, évidemment, nulles.

 

LE CORDONNIER FAIT SON TESTAMENT

 

Le 5 janvier 1684, Pierre Trilhe, le notaire, se rend de sa maison (l’ancienne épicerie de Mlle Simone Durand, sur la place de l’église) chez Philip Cassenac, maître cordonnier : il a peu de chemin à faire, c’est la «maison Choussat », datée 1660 au claveau de l’arc en plein cintre sur la rue : c’est certainement donc ce Cassenac lui-même qui l’a fait construire. Pour le moment, celui-ci est « déteneu de certaine maladie corporelle dans son lict dans une chambre de sa maison néanmoins dans son bon sens, mémoire, entendement et parfaite connaissance » comme il apparaît au notaire et aux nombreux témoins : maître Jean Pairastre, le curé, Guilhaume Batailher, Mathieu Pébernad, Pierre Escudier, Hugues Ricardou, Mathieu Pairastre et François Monginon, le greffier.

 

« Sachant l’insertitude de touttes choses et principalement de l’heure de la mort, craignant en estre surprins avant qu’il n’ait disposé de ses biens, il a fait son testament et dernière volonté selon que s’ensuit :

Premièrement après avoir invoqué le saint nom de Dieu et avoir fait le vénérable signe de la croix sur sa personne, supplie Dieu son créateur par les mérites de son cher fils Jésus Christ et par l’intercession de la glorieuse Vierge Marie et tous les saints et saintes de Paradis, Il luy plaise recevoir son âme quand elle partira de son corps, et la mettre dans son céleste paradis avec les élus et bienheureux jusques à la résurrection généralle. Soubz l’espérance de laquelle il a esleu et eslit la sépulture de son corps dans le simentière de l’esglise parroissialle Saint Sernin dudit Escossens et tombeau de ses prédécesseurs...

Venant à la disposition de ses biens, il veut et entand que Marguerite Trilhe sa femme soit nourrie et entretenue sur ses biens avec leurs enfants, travaillant tous de leur possible pour s’aider à gaigner leur vie et entretien.

Considéré que les revenus de ses biens n’y pourroit pas suffire, laissant sadite femme maistraisse et seigneuresse des personnes et biens de leurs enfants et filhe pour le tout régir et gouverner et disposer comme luy mesme pour s’en aider en cas de nécessité, donne et lègue à Catherine Cassenac sa filhe la somme de cent cinquante livres, un Met garny de cohette et cuissin du poidz de quatre vingt livres, une couverte laine blanche, six linseulz toille commune de maison, un coffre bois fau garny de ses ferrements, de mesme qu’il est dans sa maison ; une robbe selon sa condition, payable le tout par ses héritiers bas nommés, quand elle se trouvera à se colloquer en mariage ou quand elle aura atteint l’âge de vingt cinq ans...»

 

(Cassenac donne ensuite cinq sols à tous ses parents et amis : manière classique de dire qu’il ne leur donne rien).

 

... « Il nomme, crée et institue de sa propre bouche ses héritiers universels et généraux Jean et Estienne Cassenac ses enfants malles pour par iceux de sadite hérédité jouir et disposer après son décés en égalles portions »...

 

 

TESTAMENT BARBASAL

 

Quelques jours après, le 26 janvier, le notaire est appelé au chevet de Marguerite Barbasal, veuve de feu Amiel Bel, qui désire aussi tester, ce qu’elle fait dans les mêmes termes préliminaires. Elle donne à Mathieu et Jean Belz ses filhastres (beaux-fils) la somme fatidique de cinq sols. Son héritier universel est son petit-fils Jean Cabrol. Les sept témoins nous donnent un aperçu pittoresque des métiers pratiqués au village : Bernard Trilhe, maître chirurgien, Mathieu Coulombier et Jacques Monginon, tisseurs, Jean Cassenac, cordonnier, Jean Barrau maistre mareschal, Jean Ricard et Pierre Hille maistres menusiers, qui ont tous de magnifiques signatures.

 

SUBROGATION D’ACHAT DU BOIS

RICARDOU-RICARDOU

 

Le 2 février, Anthoine Ricardou, fils de Jean, « déclare avoir subrogé, comme par ce présent acte il subroge au quart de l’achat du bois fait au seigneur du lieu que le Sieur Jean Trilhe le subrogea par acte du 25 décempbre 1683 », à Anthoine et Jacques Ricardou ses oncles... Jean Trilhe représente ici le Syndic des Chartreux. Le tout est fait pour 70 livres : les frères Ricardou s’engagent à en payer 10 de jour en jour et les 60 restants à la Saint-Jean-Baptiste.

 

PARTAGE DES BIENS

ARNAUD COLOMBIER-LAGARDE

 

Le 25, deux cousins, Arnaud Colombier, fils de feu François et d’Antoinette Cabanague, maître maçon résidant aux Escudiés de Saint-Affrique des Montagnes, et Barthélémy Lagarde, fils d’Arnaud et de Marie Cabanargue, laboureur à la Rassègue, se partagent les biens de leurs mères et « prometent de nese rien plus demander au subjet de ladite succession ».

Ceci n’est qu’un acte préliminaire. Immédiatement après, Jacques Colombier, tisserand résidant au masage des Bels, consulat de Viviés-les-Montaignes, « comme mari et conjointe personne de Bernade Lagarde », se trouve content de recevoir nonante livres que Barthélémy Lagarde lui devait du fait de sa mère, Marie Cabanac ayant emprunté à Bernade Lagarde « comme apert de son contrat de mariage du 26 janvier 1679 reçu par Me Estève » d’une pièce de vigne au lieu appelé Les Fromentals dans le Consulat de Saint-Affrique, de la contenance de sept journées d’homme à fossoyer. Mais la vigne a été estimée par les deux parties 102 livres : Colombier donne les 12 livres de différence à Lagarde.

S’ensuit le partage proprement dit entre les deux cousins, Colombier, le maçon de Saint- Affrique, et Lagarde, le laboureur de La Rassègue, dans la forêt. Au premier « est advenue une maison en solier scituée dans le consulat de Viviés, masage des Salvatges ». Plus une pièce de vigne à Lagarde le long du chemin de Viviés à La Bruguière, et différentes pièces de terre, au Champ des Plos et au Pontet. Des terrains et des vignes à Saint-Affrique, dont « un petit taillis à la font des Escudiés ». Lagarde, lui, a une maison en péseil (colombage) au masage des Salvatgés, à Viviés, quatre journées de vigne à Lagarde, une pièce de terre, un chénevier au Pontet, et une vigne au Froumental de Saint-Affrique, de sept journées à fossoyer. Bernard Madaule, maître tailleur de pierres, et Antoine Bonbafous, cordonnier, qui n’ont certainement pas grand-chose à faire, servent de témoins.

 

MARIAGE ESCANDE-BENASECH

 

Le 27 février, dans la maison de Guillaumette Vaissette, veuve de Jean Bénasech, au Pas- du-Rieu, consulat de Fontiès en Cabardès, Jacques Escande, fils de Jean et de Simone Martin, laboureur à La Combe, épouse Anne Bénasech, fille de la maison. Le marié est accompagné de son frère Raymond, de son oncle Antoine Escande, et de son beau-frère Antoine Galiber. La mariée, de sa mère, de ses frères Jean et Antoine, et de ses beaux-frères Jacques Clergué et Jean Roubert. Ces gens ne sont pas riches : la belle-mère promet de doter sa fille de trente livres payables dans quatre ans. Elle lui donne un lit garni de plume, pesant cinquante livres, compris la boutance de la coite et cuissin  quatre linceuls (compris le don de la courtepointe et coussin, quatre draps) ; toile commune de maison, une couverture de laine blanche du prix de 8 livres, une caisse de bois de hêtre ferrée et une robe de dessus suivant sa qualité. Les témoins sont Joseph Alary (qui a pris la peine de monter au Pas-du-Rieu) et Paul Langeard, métayer de la Métairie- Haute.

 

ACHAT FAURY-ROLLAND

 

Le 29 février, Géraud rolland, tisserand, vend à Pierre Faury, voiturier des Abbats, pour cent livres «tant bon pré moyen que taillis» à la Resclause. Le paiement est décrit : 19 écus blancs, 8 pièces de trente sols et autres bonnes monoyes de poids... Les témoins sont Jean Barrau, maréchal, et Mathieu Sabarthès, tisserand.


6 Mars 1684. AFFERME ARNAUD-GAU-ALQUIER-BES

 

 

 

Mathieu Arnaud et Bernard Gau, du Pé de Payre (Lapeyre près de Labruguière, sur la route de Laprade) sont séquestres des fonds et fruits des biens de feus Jean et Jacques Sablairolles, père et fils. Commis, à la requête du Syndic de la Chartreuse, Dom Octavien de Creil, et du consentement de Guillaume Aussel, de Saint-Affrique, caution des Sablairolles, ils donnent en fermage à Pierre Alquier et Pierre Bés, métayers d'En Payerin (Labruguière) une vigne saisie aux Sablairolles, à la Vigne de la Beaume (Labruguière) pour trois ans à partir de ce jour et la somme de 27 livres. Plus un plantier (jeune vigne) au hameau des Tissous. Le Chartreux et Aussel promettent de fournir un tonneau et deux pipes aux fermiers, à charge pour eux d'entretenir les vignes et vaisselle vinaire en bons ménagers et pères de famille.

 

Le même jour, les mêmes séquestres donnent un pré provenant toujours des défunts Sablairolles qui devaient devoir à la Chartreuse, en location pour un an à Barthélemy Montaut, à Prat-Capel près du hameau des Margaridous, pour 34 livres. Tous les lieux nommés sont proches d'Escoussens. Chaque fois le Chartreux signe à ces actes qui ne sont pas d'un grand rapport mais qui montrent l'esprit vigilant du moine : il ne veut pas laisser les terres en friche et se conduit en paysan avisé, puisqu'il fait remplacer les Sablairolles défunts (et d'ailleurs saisis pour dettes) par d'autres fermiers.

 

Nul ne dit si le jeune Sablairolles avait des enfants que ces transactions jettent à la rue... Espérons que non.

 

Sans doute Octavien de Creil est-il au château pour un séjour assez long, afin de s'y occuper activement des biens de la communauté. Les témoins sont encore le greffier Pierre Alary et Jean Pierre Escudier, marchand d'Escoussens, avec le cordonnier Antoine Bonafous. Tous ont de belles signatures lisibles.

 

 

 

13 Mars 1684. TRANSACTION FAURY-FAURY

 

 

 

François Faury, quand vivait voiturier d'Escoussens, a constitué en dot à André, son fils, une vigne par son contrat de mariage du 3 Avril 1669, de Me Mottes, notaire. Plus cent livres de dot provenant de Marie Pech, femme d'André, dont la quittance est du 1er  Février 1670 chez Me Galiber, notaire à Labruguière.

 

Mais, par son dernier testament, François Faury a fait héritier son autre fils, Geraud, voiturier lui aussi (ils sont tous voituriers, dans la famille). André "se trouve frustré".

 

Les deux frères, prévoyant les frais et dépends d'un procès, transigent par l'entremise de leurs amis communs, dont Jean Pairastre, prêtre et vicaire : où l'on voit l'influence bienfaisante de la religion.

 

Géraud donne à son frère la maison paternelle "en solier" (sur plancher, tout simplement) au hameau des Abbats : elle longe "la rue d'Escoussens à Verdalle" et touche le four du masage : tout cela est encore parfaitement reconnaissable de nos jours.

 

Par contre, André lui troque ses six journées de vigne à Lespinas (l'Epinaie) ; indication intéressante, cette vigne touche le chemin d'Arfons à Castres, aujourd'hui qui se perd dans les prés, mais qui est à l'époque une route fréquentée, la route actuelle du Pas-du-Sant n'existant pas. Ce chemin passait entre la maison neuve qui a repris ce nom de Lespinas et la vieille croix du Breil : il va se perdre dans les prés des Martinels et de là dans la montagne de la Roque.

 

 

 

 

 

L’ACHAT D’UN CHEVAL

 

 

 

Le 15 Avril Géraud Rolland, tisserand, s'engage à payer le 25 Mai à Jean Colombier l'Hoste 42 livres du reste du prix d'un cheval. Les témoins sont Hugues Ricardou et Guilhaume Pébernad, tous deux tisserands à Escoussens.

 

 

 

UNE METAIRIE DES CHARTREUX DE CASTRES EN 1684.

 

LE SOL-VIEL A ESCOUSSENS, ACTUELLEMENT MONT-SAINT-JEAN.

 

 

 

Le 7 Mai 1684, dans le château seigneurial d'Escoussens, devant le notaire, Me Pierre Trilhe, le R.P. Dom Octavien de Creil, religieux, procureur et syndic de la Chartreuse de Castres en l'obédience d'Escoussens, a de gré baillé et baille à Pierre, Jacques et Pierre Bonnefoux, père et fils, laboureurs demeurant à la méterie de la Vitrière. icy présents, stipulants et acceptants, sgavoir est la méterie que ledit couvent a, assise au consulat dudit Escossens, dite le Sol-Viel. C'est un bail de fermage. Les Bonnafoux ne regardent pas aux déplacements : la métairie de la Vitrière, autre possession des Chartreux, qui n'existe plus, était située en pleine montagne, juste en-dessous des étangs de Roudille près de Fontbruno - et le Sol-Vieil dont il s'agit est l'actuelle métairie, alors bien solitaire dans les collines entre le Moulin de l'Avessenc et le domaine de Touscayrats, qui depuis le XVIIIe siècle s'appelle Mont-Saint-Jean, en hommage à Saint Jean-Baptiste, un des patrons des Chartreux. Même à vol d'oiseau plusieurs kilomètres séparent les deux fermes, ce que ne peuvent oublier les futurs métayers.

 

Le Sol-Viel est du labourage de trois paires (de bœufs) ou environ, avec ses bastimens, terres cultes et incultes, predz, bois, et le grand plantier de vigne haut avec tout ce quy en depent, à la réserve du pred de la Peissière. à la place duquel leur est baillé le pred de Lizoulle, avec l'augmentation qu'il y a esté faite despuis peu... La précision des lieux dits : la Paissière et l’Isoule, indique sans erreur Mont-Saint-Jean comme l'ex Sol-Viel, car la Paissière est la grande prairie pour faire paître les troupeaux entre la vieille scierie et le gué de la Vergnasse en dessous des Martinels, le long du ruisseau de Vernazobre, et l'Isoule est une pièce de terre ("la petite île") entre le Vernazobre et le béal qui longe la route et mène au Moulin de l'Avessenc.

 

C'est pour la mener et cultiver en qualité de bordiers, en ménagers et pères de familhe l'espasse de trois années et trois culhettes (récoltes) complettes et révolues, qui commenseront à la feste des Sainctz Prochaine et à pareil jour finiront : c'est à dire de la Toussaint 1684 à celle de 1687.

 

Le bail est fait aux conditions suivantes : Premièrement est conveneu que touttes semences nécessaires à ladite méterie seront mégérement fournies, et les fruits en provenant partagés en la même forme au sol et à la quartive. C'est-à-dire par moitié ; mégérement : Faren tout à mietso (nous ferons tout par moitié) : c'était encore le terme en usage dans les baux a mi-fruit.

 

Cependant les fermiers seront teneus de porter la portion dudit sieur scindic avec boeufs et charrettes au chasteau desdits seigneurs et autres lieux que bon lui semblera, sans salaire que la despence de bouche. C'est-à-dire que Dom de Creil peut exiger que les fermiers portent la récolte non seulement au château d'Escoussens, mais même à la Chartreuse de Saïx : on leur paiera leur repas. Ils seront aussi tenus de faire tous charrois et voyages pour ledit scindic lorsqu'il les commandera, sans salaire que la despence de bouche.

 

Tout le bestail gros et menut, quy se pourra nourrir à ladite méterie,  pour la culture et bonification dicelle, sera fourny par ledit sieur scindic en seul aux conditions quy seront exprimées au contrat de gazaille qui leur en sera passé.

 

Les charrettes seront fournies mégèrement et entretenues par lesdits Bonnefoux. Lesquels fourniront les outilz haratoires à leurs despends : auquel effait leur sera permis de prendre le bois nécessaire de la Montagne de Cairoulet à lendroit quy leur sera indiqué ; sera loisible susdits Bonnefoux de faire deux voyages avec boeufs et charrettes à la ville de Narbonne à leur seul profit ; comme aussi pourront faire quelques voyages autour de ladite méterie à deux et trois lieues dicelle à leur profit sans en abuzer.

 

(Sans doute les Bonnafoux sont-ils originaires de Narbonne, où y ont-ils de la famille : ni Castres, ni Mazamet ne sont stipulés dans le contrat.)

 

Seront tenus lesdits bordiers de planter annuellement à ladite méterie douze arbres fruitiers ; ne pourront iceux Bonnefoux couper des arbres de ladite méterie sans permission dudit Sieur Scindic à peine de crime ; bien pourront les esbrancher pour leur chaufage sans fraude, et le fruit quy proviendra des fruitiers se partagera mégèrement.

 

Les cuirs et chanvres quy se recuilliront à ladite méterie se partageront par moitié lorsque lesdits bordiers les auront mis pretz à la peigne.

 

Et pour ce quy est de la graine, lesdits bordiers la fourniront, et prendront toutte celle quy se recuilhira.

 

Ledit Sieur Scindic faira faire touttes les réparations nécessaires à ladite Métterie et lesdits bordiers fairont le charroy des matériaux sans salaire que la despence de bouche; lesquelz bordiers seront tenus de tenir lesdits bastimens recouvers, et ledit Scindic fournira les matériaux.

 

Le susdit plantier de vigne haut seront tenus lesdits bordiers de tenir, couper, fouir, provigner et viner en mesnagers et les vendenges seront faites à communs fraix et partagées esgalement. Les estivandiers y seront mis par ledit Sieur Scindic et sera loisible susdits métayers de faire despaisser les pourceaux de ladite méterie dans tous les bois de Touscairats et du Bois Vieux en temps de glandage.

 

(C’est-à-dire en automne, évidemment. Le fait que les porcs de Mont-Saint-Jean puissent aller glander jusqu’à Touscairats montre l'étendue des possessions des Chartreux, pratiquement ininterrompues d'Escoussens à Verdalle).

 

Seront tenus iceux bordiers de donner annuellement audit Sieur Scindic pour l’aide des tailhes la somme de soixante livres, payable à la Feste de la Magdelaine, à comencer ledit payement la première année qu’ils prendront les fruits de ladite méterie.

 

Plus vingt-cinq livres fromatge sec et salé ; seitze gelines, six poletz marseuz (poulets de Mars) et trois cent oeufs de gélines payables le fromatge et les gélines à la Toussainctz, les pavots pouletz à la feste Saint Jean Baptiste et les oeufs le long de l’année, moyenant quoy ledit Sieur Scindic les tiendra quittes de touttes les charges de ladite méterie sauf pour les droits de fournage, fougage et moitié de labourage et censives de ladite méterie, que lesdits bordiers payeront comme les autres hanées aux termes acoutumés.

 

Les oyes et les canars quy se nourriront à ladite metterie seront parties (partagées) mégèrement.

 

Seront tenus lesdits bordiers de bien bézader (creuser des caniveaux pour l’arrosage des prés) et faucher les predz de ladite méterie, en ramasser bien les foins ensemble les pailles sans en faire dégast et extraordinaire, et notamant la dernière année lorsqu'ils quiteront ladite méterie, à peyne d'estimation. Et s’il manque du foin pour la nourriture du bestail, lesdits bordiers le fourniront en seul.

 

Lesquelz métayers tiendront bien récurés les focés et en fairont des neufs en lieux nécessaires.

 

Estant conveneu que sy parties ne veulent continuer le présant acte et quilz se voudroin séparer, seront tenus d'en advertir la dernière année entre les festes de la St Jean Baptiste et de la Magdelaine,  autrement le présant acte sera censé estre continué.

 

Et pour observer tout ce dessus, lesdites parties chacune comme les conserne, ont obligés et Ipothéqués sçavoir : ledit Sieur Scindic les biens temporels de ladite Chartreuse, et lesdits Bonnefoux l’un pour l’autre et un d’eux en seul pour le tout sans faire diversion ni [ ?] d’action ; au bénéfice de laquelle ils renoncent par exprès les [ ?]       meubles et immeubles présents et advenir qu'ils ont soubmis aux forces et rigueurs de justice de ce royaume avec les renonciations nécessaires.

 

Ainsin l'ont promis et juré. Fait et récité en prézence de Me Mathieu Trilhe, lieutenant au présent siège, et François Monginon praticien résidant audit Escossens, soubsignés avec ledit Sieur Scindic, lesdits Bonnefoux ont dit ne sçavoir et moy Pierre Trilhe

 

 

 

Trilhe                                                 F. de Creil procureur d'Escoussens

 

 

 

Monginon

 

 

 

Trilhe, notaire

 

 

 


10 Mai 1684. ACHAT ALARY-COLOMBIER

 

 

 

Au masage de Rougery, Jeanne, Pierre et Jean Colombier père et fils, laboureurs y résidant (sauf Jean, qui habite le masage des Montaignols à St Affrique) vendent à Pierre Alary, greffier d'Escoussens, une pièce de terre labourable située au lieu appelé Le Siala, au-delà du ruisseau de Berlencou dans le consulat d'Escoussens, d'une contenance d'une céterée ou environ, délimité d'autan (est) du chemin de Castres à la montagne, midi et bise ledit sieur acheteur, et d'aquilon le chemin d'Escoussens à Mazamet : 110 livres.

 

Témoins : François Monginon, praticien, Jean Cassenac cordonnier, Alary greffier et Ttilhe notaire. Les Colombier ne savent pas écrire.

 

 

 

7 Mai 1684. TRANSACTION ANOUAL-BONNET

 

 

 

Jean Anoual (fils d'Antoine, et de Margueritte Donadille) tailleur d'habits habitant Escoussens, a intenté devant Maître Louis Le Maistre, juge d'Auxilhon, un procès contre Pierre, Etienne et Jean Bonnet frères, travailleurs à bras résidant à la Métterie appellée Donadille (à Auxilhon), héritiers de feu Jacques Anoual et de Marie Ricardoune sa femme.

 

Anoual demande la moitié des biens qui peuvent lui être échus tant de la succession de son père que de sa mère. Le Juge, par une sentence du 5 Mai 1679 maintient Anoual dans la moitié des biens, avec restitution des fruits (des intérêts) depuis l'indue jouissance. En 1684 Anoual veut mettre la sentence à exécution, mais Bonnet en appelle.

 

"Les parties, pensant qu'elles allaient s'engager dans un grand procès et dans de grands frais, par l'entremise de leurs amis communs ont transigé"... Surtout Anoual s'est découvert un ami commun imparable : voyant qu'il ne serait jamais payé par les Bonnet qui ont escroqué son héritage, il l'a abandonné, le 26 Avril 1684, entre les mains de Dom Octavien de Creil, qui se charge, lui, de recouvrer la dette : elle court déjà avec ses intérêts depuis 1681... Les frères Bonnet promettent de payer comme dédommagement 200 livres à Jean Anoual par l'entremise du moine, qui, on l'a vu par ailleurs, fait diligence dès qu'il s'agit des biens qui lui sont confiés : c'est un parfait homme d'affaires.

 

 

       
   
 


Ni Anoual ni les frères Bonnet ne savent écrire.

 

 

22 Mai 1684. QUITTANCE COLOMBIER-COLOMBIER

 

 

 

Mathieu et Henry Colombier frères, tisserants, fils de feu Bernard et de Guilhaumette Rivals, demeurent d'accord de ce que Mathieu à reçu d'Henry sur la succession de leurs parents par son contrat de mariage : 30 livres, et deux journées de vigne au Vignolle de la Roumenguière (Consulat de Viviers).

 

(Les Colombier savent signer. Le Vignolle de la Roumenguière signifie : l’ensemble de vignes du tas de ronces.

 

 

 

22 Mai 1684. PARTAGE RICARD

 

 

 

Voici un acte plein de naïve satisfaction de deux modestes possesseurs de terre auxquels on ne demande rien : ils ont vécu en bonne entente ensemble jusqu'ici, et c'est uniquement la mouche de l'ostentation qui les a piqués à faire étalage d'une poussière de propriétés dérisoires, dont la longue énumération impatiente le notaire jusqu'à lui faire accélérer la plume et oublier la moitié des surfaces des "loupins de terre" qu'on lui agite sous le nez...

 

Barthélemy et Guillaume Ricard, fils de Pierre, et de Catherine Vialate, laboureurs, "ont dit et déclaré avoir procédé au partage des biens qui peuvent leur être échus de la succession de leurs feus père et mère, et de ceux qu'ils peuvent avoir conquis pendant le temps qu'ils ont vécu en société".

 

1°/ Lot de Barthélemy. La moitié d'une maison en solier (maison à étage) et droit de patus au masage des Martinels : l’autre moitié appartient à Guillaume. Plus la moitié d'une grange au même hameau, elle aussi mitoyenne avec la moitié de Guillaume. Plus la troisième partie d'un jardin, toujours aux Martinels. Plus un autre jardin, de 2/4et 3/4 de quart de coupade. Plus encore un jardin, plus 2 coupades 3/4. Plus la moitié d'une petite pièce de terre sur le masage des Salvairés (les Naudets) d'une coupade 2/4. Plus un chénevier au Merduel ou à Prat Na Rivalle (le Pré de Dame Rivals) de la contenance de 1/4 et 1/4 de quart de coupade. Plus un petit loupin de terre d'une coupade 1/4 et de 2/4 de quart à Las Miquelles. Plus une pièce de pré et terre au lieu dit d'En Guitard, de 5 coupades. Plus la moitié d'un champ aux Casals. Plus une autre pièce de terre aux Casals, de 7 coupades un quart. Plus un pré au lieudit l'Arenal (la sablière) le long du ruisseau de Bernasoubre (Vernazobre) de 4 coupades, avec bésade (béal, ruisseau pour arroser). Plus la moitié indivise d'un petit loupin de terre aux Martinels. Plus une pièce de vigne de deux coupades à En Mestre (dans les collines, entre Mont Saint Jean et La Sagne) confrontant la vigne nouvellement plantée par les Chartreux. Plus une pièce de terre au lieudit l'Encoignure, de 2 coupades 3 /4 qui touche les terres de la métairie du Sol-Viel. Plus une pièce de terre au lieudit Grouignés.

 

2°/ Lot de Guillaume. L’autre moitié de la maison d'habitation et de la grange à foin des Martinels. Les 2 tierces parties du jardin. Un jardin et vigne nouvellement plantée joignant le masage des Salvairés "confrontant d'auta le ruisseau En Bernard, midi Esquirol et bise les patus et acquilon lesdits Salvairés", de 2 coupades 2/4. Plus la moitié du chénevier de Prat Na Rivalle. Plus une pièce de terre près le masage de Las Miquelles "confrontant d'auta le chemin du masage au Moulin du Vivier" (le Moulin de la Pisciculture de l'Avessenc, actuellement) de 3 coupades 2/4. Un pré et terre touchant : 13 coupades le pré, et 6 coupades la terre. Plus la moitié d'une pièce de terre... plus une autre au même endroit... petit loupin de terre sous le masage des Martinels...

 

Le notaire, impatienté par tous ces loupins, n'en a pas mis la contenance, que les frères Ricard ne connaissaient sans doute pas. Plus une pièce de vigne de 3/4 de coupade située à En Mestre. Plus une pièce de terre au-dela dudit lieu, le long du chemin d'Arfons à Castres, de 5 coupades : c'est dans la montagne de La Roque. Finalement une pièce de terre à Fontorbe, dans le même quartier, de 6 coupades.

 

"Plus lesdites parties ont dit et déclaré avoir par indivis six loupins de terres comme elles sont désignées et confrontées dans le compoix du présent lieu pour par eux en jouir des six loupins par moitié"...

 

 

 

Je connais parfaitement les lieux cités, pour m'y être beaucoup promené dans mon enfance à la recherche de pradelets et de pissocanettes [champignons]. Ils sont fort éloignés les uns des autres... Ces frères Ricard contemporains de Louis XIV et de Jean de la Fontaine ressemblent comme deux gouttes d'eau à leurs arrières-arrières descendants de la fin du XIXe siècle qui avaient eux aussi une poussière de terre, de la Roque à Prat Na Rivalle et passaient leur temps en promenades, la bêche sur l'épaule, pour aller défoncer ici deux mètres carrés, là dix mètres : ce sont les "loupins de terre" du Maître Trilhe... Les frères, pas plus que leurs lointains arrière neveux, n'ont un seul instant l'idée de prendre, l'un la vigne d'En Mestre, l'autre le jardin du village, ce qui leur épargnerait bien des déplacements au grand soleil l'été et à la bise l'hiver : non : ils partagent bien régulièrement tout en deux, afin que ni l'un ni l'autre ne soit lésé... D'autant que le rendement de cet éparpillage de carrés de terre devait être des plus aléatoires. On connait encore des familles, comme ça (il n'y a pas dix ans) où on a vu partager les serviettes d'un service de table en autant de femmes qu'en comptait la mesnie, et la nappe elle-même en autant de "loupins" afin qu'il n'y ait pas de jalouse, que l'une des ayant-droit, surtout, n'ait pas un fil de laine de plus que sa voisine.. C'est une mentalité paysanne typique, d'amasser (les frères Ricard, très Louis XIV, disent "conquérir") et de garder des morceaux de champs la plupart du temps improductifs et dont les balades pour les cultiver devaient leur prendre tout leur temps. Les lieux décrits, des Martinels à En Mestre, sont parfaitement reconnaissables ; mais il est inutile depuis beau temps de rechercher la moindre trace des maisons décrites : le hameau a changé depuis plus d'une fois de visage ; et à l'emplacement où j'ai commencé à bâtir en 1957, où mon père a bâti par la suite, il y avait les fondations, à même le tuf, d'une dizaine de masures, dont les pierres ont été portées dans le Baouch, en face de la vieille maison des Escande, pour le combler...

 

 

 

A peu pr7s comme dans la Brevette de 1699, quinze ans après, on trouve aux Martinels Jean Serres, dit Riquet, Mathieu Trilhe, Pierre et Jean Ricard, et Ricard dit Vési (Voisin). A En Mestre : Esquirol, Raymond Cassenac, Pierre Payrastre et Jacques Gros le vieux. Aux Salvairés (Naudets) : Ricard Vési, Esquirol et Salvairé. A Prat Na Rivalle, au village : Arnaud et Jean Vaissettes, Pierre Trilhe et Jean Faury Mirandel. A Las Miquelles : Pierre Payrastre, Jeanne Rivalle, Me Mathieu Estève, Jacques Trilhe et les Chartreux. A En Guitard : les héritiers de Jacques Trilhe. Aux Casals : Payrastre, les Chartreux, Ricard Vési et Trilhe. A Fontorbe : François Barbara, a l'Arénal : Gabriel Estéve. A Grouignés : Barbasa, Ricard Vési et Payrastre : on voit que les mêmes gens ont leurs biens voisins dans les mêmes quartiers, assez groupés.

 

Les frères Ricard ne savent pas écrire, mais on voit qu'ils étaient bien au courant de la moindre motte de terre en leur possession.

 

 

 

23 Mai. ACHAT TRILHE-BASSET

 

 

 

"Jeanne Basset, veuve à feu sieur Jacques Cros, quand vivait marchand d'Escoussens, comme maistraisse et légitime administreresse de ses enfants" reconnait que son mari a vendu, dans le temps, à Me Estienne Trilhe, procureur juridictionnel du présent lieu, pour 15 livres, un loupin de terre de la contenance de 3/4 de coupade et 1/4 de quart, située au lieu appelé Fonvieille : par cette estimation on voit ce que valent les biens longuement énumérés par les frères Ricard dans l'acte précédent : pas grand chose...

 

Comme il ne fut pas passé d'acte d'achat, Jeanne Basset régularise. Témoins : Etienne Rivals, marchand, et Pierre Hylle menuisier. Jeanne Basset ne sait pas écrire.

 

 

 

 

 

CONTRAT d'APPRENTISSAGE DE CHARPENTIER

 

 

 

19 Juin 1684 : a esté constitué personnellement Antoine Sendral, charpantier habitant du lieu de Pujol au diocèse de Castres, lequel de gré à promis et promet daprendre et enseigner son mestier de charpantier à André Ferroul du présent lieu d'Escoussens icy présent stipulant et acceptant, et c'est moyenant deux ans de temps que ledit Ferroul aprentif promet de le servir en ladite qualité d’aprentif, sans que ledit Ferroul puisse prétendre aucun salaire que la depance de bouche et la somme de douze livres que ledit Sendrail promet lui donner et payer après la fin des deux années, qui comanceron au premier jour de juilhet prochain, et venant à fin de pareil jour de l'année mil six cens quatre vingt six. Et si pendant ledit tems ledit Ferroul venoit à quitter ledit Sendrail sans légitime excuse, il sera permis et loisible audit Sendrail de prendre un compaignon dudit mestier de charpantier aux fraix et despans dudit Ferroul - comme aussi si ledit Sendrail renvoyoit ledit Ferroul sans légitime excuse pendant le cours desdites deux années, il sera loisible audit Ferroul d'aller chés un maistre dudit mestier aux fraix et despens dudit Sendrail. Sera tenu ledit Sendrail de faire blanchir le linge audit Ferroul aprentif, pendant lesdites deux années, et pour observer tout ce dessus lesdites parties chacune comme les concerne ont obligés et Ipothéqués tous et chacuns lesdits biens présens et advenir qu'ils ont sousmis à toutes rigueurs de justice de ce royaume...

 

(Aucun des deux ne sait signer, Témoins : Jean Suc et Hugues Ricardou, d'Escoussens, et le notaire Pierre Trilhe).

 

 

 

21 Juin 1684. QUITTANCE VERDIER-COLOMBIER

 

 

 

Jeanne Verdier, veuve à feu Georges Blanc, héritière de son père feu Hugues Verdier, habitant au masage de Veissière : son père a vendu à Estienne Blanc, pareur de draps, une maison et jardin (acte du 17 Novembre 1667). Pour 400 livres. Il a reçu 202 livres 14 sols un denier - et 197 livres 6 sols onze deniers de Jean Colombier Hoste, qui a payé 77 livres 6 sols onze deniers (acte du 18 Octobre 1683). Colombier paie ce jour même, en présence du notaire et en "escus blancs pièces de 30 sols et autres bonnes monnoyes" le reliquat : 120 livres. Il stipule : "et en cas que Messieurs les Chartreux seigneurs du présent lieu lui viendroint à demander à elle, Jeanne Verdier, quelques arrérages ... ledit Colombier s'oblige de payer à la descharge de ladite Verdier"...

 

 

 

23 Juin. ACHAT TRILHE-BASSET.

 

 

 

Jeanne Basset revient : elle vend à Pierre Trilhe, voiturier, un pré que son mari avait acheté d'Antoine Blanc, travailleur (agricole) du masage de La Faurinié (12 Avril 1666, Me Mottes notaire). Ce pré est à La Resclauze, de la contenance d'une céterée ou maison, longeant le ruisseau de La Resclauze : 500 livres.

 

C'est une dette : Trilhe doit payer au Syndic des Chartreux Octave de Creil, présent à l'acte. Il verse immédiatement au Chartreux... une dette de cent livres qu'ont envers lui Jacques, Mathieu et André Faury père et fils, marchands ! (Acte d'obligation du 3 Juin 1681, Lavilha, notaire à Labruguière).

 

Trilhe promet de payer la rente et pension annuelle des 400 livres restantes, à la Chartreuse, de 9 en 9, et de 29 en 29 ans pour éviter la prescription. Il donne 20 livres, qui est l'intérêt de 400 livres "à raison du denier vingt" et commencera à payer la rente de 20 livres au Chartreux le 15 Août prochain. C'est du 5 %. Ses successeurs payeront an par an à perpétuité tant que les 400 livres resteront entre leurs mains. Quand Trilhe payera les 400 livres, la rente sera amortie.

 

Témoins : Mathieu Trilhe, lieutenant juridictionnel, Guillaume Bathailler marchand, Octavien de Creil. Seule Jeanne Basset ne sait pas écrire.

 

 

 

25 Juin. QUITTANCE RICARD ET SES COLLEGUES AVEC MAHUL.

 

 

 

C'est une affaire entre consuls. Jean Mahul, premier consul (l'équivalent du maire actuel) de l'année dernière 1683 et collecteur, a payé 141 livres onze sols et 4 deniers imposés en faveur d'Arnaud Ricard et ses collègues Guilhaume Fauri, Antoine Ricard et Jacques Colombier tous consuls en 1671. Plus 7 livres un sou et 6 deniers d'intérêt. Les consuls ont quand même attendu 13 ans qu'on les rembourse de l'argent avancé à la communauté...

 

Témoins : Jean Suc, Mathieu Colombier, tisserand. (Ricard ne sait pas écrire).  

 

 

 

29 Juin 1684. AFFERME FAURY-ESCUDIERr-CASSENAC.

 

 

 

Pierre Faury et Antoine Homps, marchands de Labruguière, et Jean-Pierre Escudier, fermiers décimaux de l'Evêque de Lavaur, de M. le Précenteur et de M. le curé d'Escoussens, donnent en afferme au cordonnier Jean Cassenac "les affréta, consistant tant en millet, chanvre, lins et autres menus grains et avoines mauresques" qu'ils peuvent avoir dans le décimaire d'Escoussens, pour 150 livres par an et pour 4 ans et 4 récoltes complètes, qui commenceront aujourd'hui et finiront à pareil jour l'année 1688. Cassenac devra payer les 150 livres en deux fois l'an : la moitié à Noël et l'autre à Pâques. Il doit donner, sous huit jours, de bonnes et suffisantes cautions, sous peine de nullité.

 

Témoins : François Vidal, de Verdalle, Jean Barrau, maître-maréchal d'Escoussens.

 

 

 

1er Juillet. QUITTANCE FAURY-SENDRAL.

 

 

 

Jacques Fournés, fils de feu Géraud et de Bernade Ricardoune, laboureur à la Méterie-Grande (Verdalle) et pour ses frères Arnaud et Barthélemy "estant au mesme pot et feu", a reçu de Antoine Sendral Maitre-Charpentier du lieu de Pugeol, mari de Jeanne Ricardoune, 57 livres deux sols - soit 50 Livres 5 sols des intérêts liquidés du capital de 62 livres 13 sols, qui avait été constitué à sa mère ; et 6 livres 17 sols des dépenses faites par Fournés pour retirer paiement. (Ce qui prouve qu'il y a eu querelle, et que Sendral n'a pas payé sans contester). La somme est payée en écus blancs de trente sols par devant le notaire et témoins. Sendral devra payer le capital de 62 livres 13 sols au notaire.

 

Témoins : Mathieu Trilhe, lieutenant juridictionnel, et Hugues Ricardou. Faury ni Sendral ne savent écrire.

 

 

 

2 Juillet. VENTE DE BOIS RICARDOU- PROVANQUIER

 

 

 

Antoine Ricardou, Géraud Fauri, Pierre Fauri et un autre Antoine Ricardou, associés pour la vente du recépage du bois qui a servi pour les bois de canne, vendent à Louis Blanc, fils de Jean "Proubenquière", habitant du Sendié, « une certaine quantité du même bois qu'ils ont acheté au Seigneur du lieu" (les Chartreux). Le bois est à Roudille, marqué et limité : 40 livres.

 

(Le recépage est l'action de couper des arbres au pied pour qu'ils repoussent plus droits et plus fermes : cela se fait pour les roseaux, les joncs. Or le bois de canne n'est rien d'autre que du roseau : celui qui pousse toujours au bord des étangs de Roudille, ancien vivier des Chartreux. Comme encore dans l'Aude et dans l'Hérault, les joncs et cannisses étaient utilisés pour couvrir des granges, des étables ou des habitations de paysans pauvres. Il y a longtemps que cette façon de couvrir est abandonnée dans le Tarn, où on a préféré le chêne, le hêtre ou le châtaignier, plus résistants. Mais la notation est intéressante : nul n’aurait l’idée de nos jours de vendre des roseaux coupés pour dégager les abords d'un étang : ils seraient tout simplement brûlés sur place).

 

Blanc paiera 20 livres à la fête de Saint Mathieu prochaine ; et 20 livres à la Saint Mathieu de l'an prochain. Il observera, pour l'exploitation du bois, les clauses portées sur leur contrat.

 

Le même jour, les mêmes associés vendent à Pierre Molinier, des Pradairols, résidant au masage de La Blanquarié, "du même bois qu’ils ont à leur vente située au lieu appelé Roudille", marqué et désigné : 39 livres, toujours payable à deux fêtes de Saint Mathieu successives.        

 

 

 

3 Juillet. TRANSACTION ESQUIROL-DELRIEU.

 

 

 

Se retrouvent deux beaux-frères : Pierre Du Rieu, habitant de La Glevade( consulat de Burlats) mari et conjointe personne de Marguerite Ricard ; et Pierre Esquirol, du masage des Martinels, mari de Marie Ricard, toutes deux filles de feux Jean et Antoignete Castelle.

 

Delrieu sera tenu de payer d'ici à la Saint Michel prochaine 72 livres à Esquirol, moyennant quoi ils seront quittes de la succession de leurs beaux-parents.

 

Arnaud Ricard, frère et tuteur testamentaire du défunt, conjointement avec Delrieu, de Marie Ricard épouse Esquirol, demeurera chargé de la tutelle, suivant le compte qu’il leur en a aujourd'hui fait.

 

Témoins : Jean Suc, et Mathieu Pébernad.

 

 

 

 

 

 

 

4 Juillet. ACHAT VAISSIERE-DELRIEU.

 

 

 

Delrieu est allé coucher aux Martinels chez son beau-frère, car on le retrouve le lendemain chez le notaire : il profite de son voyage à Escoussens pour liquider une maison dont il n'a que faire, maintenant qu'il habite Burlats. Il vend 110 livres à Autgé Vaissière, charbonnier, fils de feu Jean-Jacques, habitant au masage de La Faurinié une maison que Delrieu possède en ce hameau "la mesme qu'il avoit sy devant vendeue à un misérable passant au présant lieu" !

 

Vaissière promet de payer dans deux ans à partir de ce jour. Témoins : François Monginon, praticien, et Jean Servat, d’Escoussens. Les parties ont dit ne savoir signer.

 

 

 

4 Juillet. AFFERME BATAILLER-BOURREL.

 

 

 

Estienne Bathailher, résidant au masage de Catala (Labruguière) mari de          [ ?] Pradière, mariée en premières noces à Pierre Bourrel jeune, et seule ayant droit et cause de Catherine Bourrel fille dudit ; et ladite Pradière étant morte ab intestat (sans faire de testament) :

 

Donne en afferme à Jacques Bourrel, laboureur aux Campmases la moitié de tous les biens appartenant à Pradière, dépendant de la substitution de feu Mathieu Bourrel, situés au lieu des Campmases.

 

L'afferme est faite pour 4 ans à partir de ce jour, et pour six livres par an, que Bourrel s'oblige à payer à la Saint Jean Baptiste. Témoins : Mathieu Trilhe, lieutenant juridictionnel, et Guilhame Pébernad ; Bourrel signe mais pas Batailler.

 

 

 

9 Juillet. QUITTANCE FAURY-ESCUDIER-TRILHE.

 

 

 

Bernard Trilhe, premier consul et exacteur d’Escoussens, en 1680, paie 55 livres imposées en 1682 à Jacques Faury et Jean Pierre Escudier (comme héritier de Jean Antoine Escudier son père) consuls en 1667...

 

La somme a été vérifiée le 5 Janvier 1669... Il ne fallait pas être pressé ! Bernard Trilhe, le payeur, n'assiste pas au paiement : aurait-il honte ?

 

 

 

9 Juillet. ACHAT SABARTHES-ROUGE-NEGRE.

 

 

 

Benasech Rougé et Guilhaume Nègre, maris de Marguerite et de Jeanne Lagarde, laboureurs résidant au masage du Sindié, vendent au boulanger Jacques Sabarthés "une petite maison en péseigne située dérrière le fossé dudit Escoussens, tenant du côté d'auta celle des hoirs Mathieu Armengaud, midi le fossé, bise et patus des hoirs Jean Ricard de l'Hoste et d'acquilon la rue"... C'est une des maisons du tour du château, dans ce qui est actuellement la rue des Chartreux. On n'en saura pas plus, car la dernière page du registre du notaire Trilhe pour la moitié de 1684 a disparu...

 

 

 

LIEUX DITS D'ESCOUSSENS.

 

 

 

Comme on verra, la plupart des noms est relative à la configuration montagneuse du terrain : Avessenc, Plan-Barran, Cap Daurat, la Resclauze, la Roque, Roc dé la Gousso, Roc d'En Bal, Roquecérière, Roquecave, Roc-qué-ratso, la Blancarié, l'Usclado, Comboscuro, la Parro, le Plo-del-May, Montagnol...

 

Enormément ont trait à l'eau : Rec dés Pruniés, En Cancé, les Fontanelles, Fontfroide, Fontorbe, la Racanelle, Font-de-Ladou, Font des Escrabats, Fontvieille, l'Isoule, le Pesquié, la Sagne, le Therondel...

 

Beaucoup sont relatifs à la flore : Vernazobre, la Fabatelade, les Vignals, les Bruguès, Rougéry, le Sahuc, Fourmental, la Vergnasse, Champ de Tabac, l'Espinas, la Sauze, Fénayrols, le Bayssas, le Breil, les Garrigues...

 

A la faune beaucoup moins : l'Agassié, le Rec dé la lébrè, le Mouscaillou, les Nizarels, le Nid del Gorp, le Pesquié, En Pargo...

 

A l'activité humaine : la Tuilerie, la Vitrière, la Marbrière la Mine du Fer, les Cazals, lou Camp dés Téoulès, la Rasségue-Nauto, les Assises, les Bousigues, Touscayrats...

 

Quelques noms de familles anciennes, souvent disparues : En Vayssiére, Barthés, les Ricardous, la Faurinié, la Ricardarié, la Fournésié, les Colombiés, les Salvayré...

 

A peine trois noms rappellent les anciens seigneurs Chartreux : les Abbats, Fontbruno, Mont-Saint-Jean.

 

Quelques vocables rappellent des croyances ou des faits religieux : Rec dé las Fados, Colline des Rosaires, Cayroulet, le Plo-del-May, Prat-Marivale.

 

Enfin, curieusement, le vent, qui souffle d’un bout à l'autre de l'année, n'est connu que par un seul nom : Bisebarre ; et le vent d’autan "le fléau du pays" comme on dit au XVIIe siècle, n'est jamais nommé.

 

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