JACQUES BASSET RECTEUR DE MAZIES (CAMBON-LES-LAVAUR, 1682)

JACQUES BASSET

 

RECTEUR DE MAZIES

 

(CAMBON-LES-LAVAUR, 1682)

 

 

 

PAR JEAN ESCANDE

 

 

 

            En mars 1682, Maître Jacques Basset, Recteur de Maziès, teste en faveur de nombreux neveux et nièces. Maziès se trouve entre Cambon-les-Lavaur et Le Fajet, mais il ne faudrait pas croire que tout ce qui précède ait été trouvé facilement : la découverte de Maziès n’a pas été si rapide... De 1682 où teste Maître Basset à cette belle journée ensoleillée de l’hiver 1980 où je me suis rendu à Cambon-les-Lavaur, 300 ans ont passé, effaçant bien des choses... L’église et le presbytère de Maziès, par exemple, dont il est question dans le testament. Le Recteur ne reconnaîtrait plus son gîte.

 

Cambon-les-Lavaur est un petit village adossé à une colline un peu à l’écart, sur la route de Puylaurense à Toulouse. Apparemment personne n’y a jamais entendu parler de Maziès... Sauf finalement une veille dame, qui se souvient :

 

-C’est une petite ferme sur la route, à gauche, en allant vers Toulouse... Que ça ait été une paroisse dans le temps, vous m’étonnez... C’est un endroit sans rien de particulier... En tout cas moi je n’y ai jamais vu d’église !

 

Pourtant Maziès (encore marqué « Maziers », à la française, sur la carte de Cassini) a bien pour emblème une église paroissiale, je n’ai pas rêvé... Nous voilà redescendus malgré le givre au grand soleil, sur la route. Un écriteau : Maziès. C’est là...

 

L’église Saint-Martin a complètement disparu. Maziès n’est plus qu’une petite ferme avec un bel ormeau à l’entrée du chemin, une mare où pataugent des canards, un énorme tas de fumier et des silos à maïs. Des pigeons gorge-de-pigeon se promènent sur le toit. Dans l’air bleu monte une fumée transparente.

 

Les bâtiments ont l’air d’avoir été complètement refaits dans le style toulousain du XIXe siècle, avec des encadrements de briques et une simple génoise. Bref une de ces petites fermes comme il y en a des milliers, qu’il faudrait se hâter de classer avant que les pelleteuses ne les tuent au profit des si moches F4, une de ces jolies fermes devant laquelle filent les voitures pressées, le samedi, de répandre leurs ventrées de Toulousains dans nos campagnes.

 

Et à ce propos je voudrais signaler combien cette route Toulouse-Puylaurens a été salement saccagée ces dernières années, combien de ces fermes en péseil et pans de bois ont été démolies pour construire ces arrogantes villas petite-bourgeoises à balcons espagnols. Il y en avait une ravissante, à Saint-Germain-des-Prés : heureusement j’ai pu en faire une aquarelle à temps, avant sa disparation.

 

Donc il y a eu, dans le temps, une église et même un presbytère à Maziès. « Je teste » dit le curé contemporain de Louis XIV, « dans la maison que j’ay fait bâtir à mes despans tout joigniant lesglize Saint Martin de Maziès ». Montons au Faget, la paroisse où il a fait enregistrer son testament. La neige recouvre ce paysage de collines harmonieuses, et de bâtiments agricoles anciens admirablement intégrés. Le Fajet, sur une de ces barres allongées qui dominent deux vallons, est un de ces villages du Lauragais dont la rue principale est exactement la ligne de crête. Et là, surprise : M. le maire nous ouvre obligeamment un magnifique, extraordinaire compoix de 1699 qui nous renseigne sur tous les témoins du testament ! Ils dorment tous là depuis 300 ans, et c’est certainement tout ce qui reste de leurs vies ! Guillaume Trial, prêter et curé du lieu, Bernard Founbouze, le notaire, Arnaud La Porte, Jean Donnat, le chirurgien, les Joffre et les Denille, les Rocolles, tous ces gens ont, bien exactement dénombrés, leurs maisons, jardins, prés, bois et champs... Le compoix a été fait de neuf cette année-là, et c’est le plus ancien document conservé à la mairie du Fajet, le compoix précédent ayant été détruit, on nus le dit expressément dans la préface... Mieux que cela, cet admirable cadastre est orné de plans des moulons (sections cadastrales) avec le dessin, très naïf et expressif, des habitations de l’époque : l’agrimenseur (le géomètre) les a parfaitement et naïvement représentées : elles sont en colombages bourrés de briques de terre crue.

 

Maître Jacques Basset, le Recteur de Maziès, prend soin de nous donner différents renseignements sur lui-même ; il est né à Massaguel, il a été curé à Durfort, cathédrant à Puylaurens, et il termine sa carrière dans une des deux paroisses de Cambon-les-Lavaur : Saint Martin de Maziès, l’autre étant Saint Pierre du Lac.

 

Les Basset et les Barbara, dont il est aussi question dans l’acte, sont au XVIIe siècle deux familles marquantes, et d’ailleurs alliées, de la région. Y pullulent les hommes de loi, avocats, les ecclésiastiques comme le prêtre Jacques Basset : cent ans plus tard, en 1760, naît encore à Sorèze un enseignant, César Auguste Basset, bénédictin, d’abord professeur au collège de sa ville natale, qui finit au collège Charlemagne à Paris en 1828, après avoir écrit différents ouvrages didactiques (Biog. Univ. de Feller, 1845).

 

En 1699, sur la Brevette d’Escoussens, on voit que Jean Basset, avocat, et François Barbara, docteur en médecine, ont des biens au hameau de la Rivalarié : François Barbara possède la métairie de Vareilles, située plus haut dans la montagne et qui a un panorama superbe sur la plaine de Verdalle. Le 1er juin 1700, à N.D. de la Platé de Castres, il fait baptiser Magdeleine, une fille qu’il a eue de sa femme Isabeau Lavesque. C’est le moment où la famille Barbara brille d’un vif éclat en la personne de Mathieu, né à Verdalle en 1644, juge criminel de Castres, sous-intendant du Languedoc bien connu pour sa répression des protestants. C’est à Germain Barbara que se réfère Jacques Basset comme juge de son testament : il ne devait pas être médiocrement fier de cette alliance.

 

Les Basset et les Barbara sont de ces familles bourgeoises de la Royauté où foisonnent les ecclésiastiques sous toutes leurs formes (curés, moines divers et variés) et les administrateurs (avocats, parlementaires) ; de même qu’au XIXe siècle la bourgeoisie, empesée de Raison et de Scientisme, donnera des militaires, des industriels, des médecins et des colons, l’Eglise et le Barreau, devenus vieux genre, étant de plus en plus abandonnés à la petites bourgeoisie, voire aux classes populaires.

 

Le prêtre fait d’abord des legs charitables envers les pauvres de sa paroisse et les églises des lieux où il a exercé son sacerdoce. Puis il partage son bien entre ses trois neveux : entre les Basset et les Barbara il ne nomme pas moins de neuf parents, sans qu’on sache si Catin de Basset, épouse Mouret et Marie de Basset épouse Bories sont ses sœurs ou ses nièces ; on remarquera que ces deux femmes sont les seules à avoir adjoint une particule à leur patronyme. Vanité féminine ou habitude linguistique ?

 

Jacques Basset n’oublie pas la fille de son valet espagnol, Crisse (Christine) Condomin. Ce n’est pas un juriste, et il s’en excuse : « Cest ma seulle et dernière volonté... Quoy quelle ne soict pas icy exprimée selon toutes les formes de droictz ».

 

 

 

Testament

 

 

 

            L’an mil six cens huictante deux et le vingt septiesme jour daoust dans le Consulat de Cambon lieudict à Maziès diocèse de Lavaur sénéchaussée de Thoulouse, avant midy, régnant très crestien prince Louis, par la Grâce de Dieu Roy de France et de Navarre, devant moy notaire royal et tesmoings bas nommés

 

Est paru M. S. Mathieu Basset, ad. Au siège de Puilaurens, nepveu de feu Jacques Basset, prebstre et curé dudit Maziès, quy a dict luy avoir esté remis une cart couverte d’une enveloppe de papier non timbré sur laquelle enveloppe est escrit de la main dud. S. Basset curé les mots suivants :

 

« Icy est escrit le testament et dernière disposition de Me Jacques Basset, prbre. Et Recteur de Maziès.

 

Loué soit le bon Dieu, que se soict pour la Gloire et pour le Repos de mon Ame. »

 

Dans laquelle enveloppe il est trouvé lad. Cause cachetée en huict cachets de sire rouge ardent avec des filets noirs avec le cachet du feu Sr. Basset, dont la teneur s’ensuit :

 

« Lan mil six cens huictante deux, et le premier jour du mois de mars au Consulat de Faget, diocèse de Thle., et dans la maizon de Me Bernard Founbouze, régnant Très Cr. Prince Louis par la Grâce de Dieu Roy de France et de Navarre. Par devant moy notaire et tesmoingz bas nommés, fut constitué en personne Me. Jacques Basset pbre. Et Recteur de Maziès, lequel a dict et déclaré devant moy No. et tesmoingz que dans ce papier timbré constenant une feuilhe, Il a escrit et signé au fond de chaque page ses testament et dernière disposition qu’il a cachetés en huict endroicts de sire rouge et marqué de son cachet, lequel testament il veult qu’il demeure secret jusques à son décés, après lequel il veult et entent que immédiatement après son décés il soict ouvert et publié par devant moy notaire et tesmoingz, à la diligence de ses parens et autres quil apartiendra, sans aucune fomalité de justice. De quoy et de la présante suscription led. Sieur Basset pbre. a requis pour la validité du présant testament ce que luy ay concédé Présant à ce : Me. Guilh Trial pbre. etCuré dud. Faget, Me Arnaud Laporte pbre. et vicaire dud. Faget, Me. Estienne Durand Juge de Carmaing et Saint Félix, Jean Donnat Me. Chirurgien, Anthoine Denille vieux, François Guiraud, Jean Joffre fils d’autre Jean, bourgeois habitants dud. Faget, soubsignés avec led. Sieur testateur, quy a déclaré quil veust que le présent testament soict à son plain et entier effect comme estant sa dernière volonté ; et moy Bernad Founbouze No. Royal Reseveur par Sa Majesté du lieu du Faget, baronnie d’Auriac et Montagut, résidant audit Auriac, requis et délivre aud. sieur Basset sans autre commandement.

 

Basset pbre. et Curé de Maziès, Trial pbre., Laporte pbre., Durand, Denille, F. Guiraud, J. Donnat, J. Joffre, Founbouze notaire ainzi signés sur la Cart. dud. Testament.

 

Laquelle Cart. il nous a baillée avec l’enveloppe, Nous a requis attandu la présence de Me. Pierre Sicard pbre., du sieur Germain Barbara, Jean Rocolles maire de Faget, du sieur Jean Lissoire fesant pour Me. Jean Basset Juge de Revel, Jeanne Pinel femme de Jean Basset sirurgien de Massaguel proches parens dud. s. feu –et des tesmingz numererés de lad. suscription bas nommés, de vouloir tout présentement à la volonté du sieur testateur, procéder au descachètement ouverture, et publication et enregistrement dudit testament.

 

Auquel effaict il nous a remis en présance de tous les sus-nommés et desdicts tesmoingz numérerés bas només, lequel nous aurions exibé à Me. Guilh. Trial pbre. et Curé du Fajet, et Jean Donnat Me. Sirurgien et Anthoine Denille vieux. Lesquels après avoir remarqué les seings appozés à ladite suscription, ont dict et attesté recognoistre leurs signes chacun et plus celui dudit feu Basset testateur, et sus desd. Durand Joseph et Guiraud.

 

Après quoy en leur pésance et de tous les sus noméms nous aurions procédé au descachètement, ouverture et publication dudit testament, que nous aurions trouvé dument cacheté comme il est dict cy dessus, sans aucune altération, et faict la lecture dicelluy en présance de tous les sus noméms, à aute et intelligible voix : (s’ensuit à l’enregistrement à la réquisition du susdit requérant en la manière que s’ensuit :)

 

« In nomine patris et filii et spiritus sancti. Sachent tous présans et à ladvenir que le troizième jour du mois de febvrier mil six cents huictante deux, ... devant la paroisse de Maziès, Cponsulat de Cambon, et dans la maison que jeay faict bastir à mes despans, tout joigniant lesglize St Martin de Maziès, ego Jacobus Basset, presbyter indignus et rector huius loci de Maziès, bene cognossens et Jeay recommandé mon âme à Dieu mon doux Rédempteur, et bénévolement à tous les sains et saintes du Paradis, et particulièrement à mon patron St Jacques et à mon ange tutélaire, affin quà lheure de ma mort ils intercèdent pour mobtenir de la miséricorde de Dieu et rémission de mes pêchés par une bonne et véritable contrition d’iceux, appuyée sur les mérites de la mort et passion de Jésus Crist Notre Seigneur, me recognoissant indigne de tant de biens et grasses que jeay receux de luy, ayant poursuivy comme je devois dans la fonction de prebstre, lui demandant un bénévol pardon de tous les manquemens que jeay faicts en lexercisse de ma charge, comme aussy de tous les pêchés, actions et obmissions contre les commandemens de Dieu et de lesglize.

 

Espérant en la miséricorde que je réclame du profond de mon âme, je veux qu’après la séparation dicelle, mon corpz soict enselevy dans lesglize de Maziès, et que mes honneurs funèbres soict faicts immédiatement sans bruit aucun où je désire d’appeller six prebstres chantant messe ce jour là sil se peut ; et leur lègue vingt solz à chacun avec leur réfection corporelle, et s’il y en a plusieurs leur lègue quinze solz.

 

Jordonne vestir six pauvres de ma paroisse et leur donne une canne cordelat gris à chacun. Jordonne et veux douze chandeles blanches, à sçavoir six à lautel et six à lentour du cercueil. Je donne au bassin de lesglize un escu blanc pour loffrande. Je donne à ladite esglize de Maziès le calisse d’argent, le ciboire d’argent et ma chasuble, aube, un ( ?) à surpelis de deux que j’en ay comme à la garderobe que jeay ans lesglize.

 

Je donne à lesglize de Massaguel lieu de ma nesance un escu blanc payable une seulle fois, et à M. Sicard prebstre et vicaire et parent je luy donne et lègue trente livres pour me dire soixante messes de mort ; et autant en donne à Monsieur Barbara mon nepveu et filheul ; Et autres trente livres pour autant de messes à autres prebstres aux lieux que mes héritiers jugeront.

 

Deplus donne à lesglize de Durfort où jeay servi, la somme de deux livres payable une seulle fois. De plus donne et lègue à mondict nepveu Jacques Basset tout ce quil peust me devoir et le laisse exécuteur testamentère, m’assurant quil sen acquittera ; et luy laisse le chalit, la table petite, quatre chèzes et le petit coffre de noguier (noyer) et tous mes livres vieux et nouveaux ensemble. Luy lègue tous ces petits meubles nécessaires pour tenir maison. Comme jentends quil fera les payemens je résigne aussi mon bénefisse.

 

Plus donne et lègue aux pauvres nécessiteux de ma paroisse ou de mes parans la somme de cinquante livres. Plus donne et lègue à tous ceux qui me doivent des grains ce quils me peuvent devoir, soict par promesse ou par mémoire escrit dans mon journalier.

 

Plus donne et lègue à Monsieur Basset Juge de Revel la somme de cent cinquante livres outre ce quil me peut devoir, payables dans lan de mon décéz.

 

Plus à sa sœur Marie de Basset mariée avec le sieur Pierre Bories, de Blanc, autres 150 L. payables aussy dans lan sy mieux elle n’aime prendre la vigne que jeay acquize de Barthélemy Rech. Plus à tous mes filieux et filheules mes parens la somme de cinquante livres payables aussy dans lan.

 

A Crisse Condomin, filhe de Coundominas Judir mon valet trente livres payables aussy dans lan, et à François Basset fils de mon fraire Anthoine Basset, luy donne ce quil me doict ensemble les biens que jeay à Lempaut, ou la rente diceluy quy est dix-huict livres ; ensemble luy donne tous les meubles, coffres, lict, linseuls et robe ; ensemble la somme de 150 L. que j’aurois payée à sa sœur mariée audit Jean Pons, de Fajet que je demeure jouissant ; et à mon valet quy me sert présentement la somme de 100 L. outre ce que je luy ay bailhé pour labillié, ou ce quil auroit besoing.

 

Plus donne et lègue à Jean et Anthoine Rocolles deux cestiers de grain à chacun, payables à la récolte prochaine.

 

Et à mes autres droits, voix et actions nomme pour mes hériters universels esgaux, à sçavoir Mr. Mathieu Basset ad. et No., Me Pierre Jean Basset avocat, fraires, et Jean Basset sirurgien demeurant à Massaguel, luy donne par préciput le pred et vigne et portion de bois que jeay à Massaguel, en cas il aura des enfans mâles de son mariage et non autrement, voulant et entendant que tous mes biens se partagent en trois portions égales.

 

Sy le cas n’arrivait pas m’assurant qu’ils se diviseront après avoir payé tous mes légataires cy dessus mentionnés sans bruict ni déffaut. Et encore s’il parait quelque dispute ou différend, je laisse le sieur Barbara pour juger de ces différans ; et au cas (où) aucun diceux ne voudra pas se soumettre au jugement dudit sieur Barbara mon successeur, je donne la portion dicelluy là aux prebstres de Massaguel, et Dourgne (dans le cas où l’un des légataires refuserait sa part, je la donne aux prêtres de...) luy donnant tant seulement tout ce quil me peust devoir par promesse ou contract, et je le prive et déclare indigne destre mon héritier.

 

Espérant par la grâce de Dieu que le tout soit fait à la plus grande gloire de Dieu et que le cas de privation et indignité n’arrivera pas, n’ayant fait cette clauze que pour les maintenir en paix et en bonne intelligence.

 

Comme aussy veux et entends, qu’encore mes légataires ne seroient pas contents et recognoissants de ce que je leur lègue, je les déclare indignes de mon souvenir et prive de leur legat, qui reviendra en faveur de mes héritiers Mathieu, Pierre-Jean et Jean Basset, tous fils de mes fraires François et Anthoine Basset. Veulx et ordonne que ces miennes dispositions soient de plain effect, renonçant tous autres testaments cy devant faicts, et parce que cest ma seulle et dernière volonté que veux être expréssèment gardée, quoy quelle ne soict pas icy exprimée selon toutes les formes de droictz.

 

En foy de quoy jeay signé ma déposition à chaque page.

 

Faict à Maziès le troizième fevbrier mil ix cens huictante deux

 

 

 

                                                                                  J. Basset pbre.

 

 

 

Et signé en trois endroicts au fond de chaque page dud. Testament quy ma esté remis en original en mon pouvoir. De quoy et de tout ce dessus led. Sieur Basset requérant, l’un desdits hériteiers a requis acte, et tous les parans sus nommés ont déclaré estre contants et satisfaictz des libéralités dont ils le remercient très humblement, et se sont signés avec lesdits sieurs Trial, Donnat et Denille, tesmoingz, et moy Bernad Founbouze notaire royal du Fajet baronnie d’Auriac requis soubzigné

 

 

 

                                                                                  Founbouze, No. signé

 

*

 

 

 

Les héritiers de Jacques Basset sont contents. Seul un papier est cause de contestation, et c’est d’ailleurs grâce à lui qu’a été recopié tout au long cet intéressant testament, sans doute tout ce qui reste de la paroisse défunte de Maziès.

 

En 1668, quatorze ans avant, deux paysans, Jean et Guillaume Bourgès, fils d’un laboureur au mazage (hameau) de la Rivalarié, à Verdalle, « faisant tant pour eux que pour leurdit père absant, duquel ont dict avoir charge, demeurant ensemble et en commun, ont conféssé (reconnu) devoir à Me Jacques Basset, prêtre et cathêdrant de Puylaurens, içi présent, la somme de 80 livres : 68 que leur père devoit au S. Basset comme cessionnaire du S. François Barbara, marchant de Verdalle –par acte receu par feu Me Jean Jacques Galaup notaire de Dourgne le 5 décembre 1640 » : les Bourgès reconnaissent donc, en 1668, devoir 80 livres depuis déjà 28 ans...

 

Leur père, Jean, le laboureur, avait acheté une vigne « assize au consulat de Scousens » (d’Escoussens) au marchand Barbara, qui lui avait remis 12 livres de plus « par amiable présent en bonne monnoye » ! Les Bourgès père et fils devaient payer dans l’espace d’un an : en 1669. « Ils y ont obligé leurs biens présants et advenir et ceux de leur père soubmiz aux rigueurs de justice de Thoulouse, Carcassonne, etc... » Le curé Jacques Basset devait être, comme son prédécesseur François Barbara dans cette dette, un brave bougre, car les laboureurs s’empressent de ne pas payer, ni en 1669, ni après.

 

Ce sont les seuls débiteurs de Jacques Basset qu’on trouve liés par un acte, et le prêtre avait du les oublier depuis longtemps ; car on ne les a pas vus mentionnés dans son testament.

 

Les héritiers, eux, décident de les poursuivre. A première vue, le fait de leur faire rendre gorge est en contradiction avec le désir du prêtre de remettre leurs dettes à tous ses débiteurs.

 

Mais, à la réflexion, les Bourgès sont de mauvaise foi. Comment ! De 1640 à 1682 ils ont eu 42 ans pour rembourser une vigne de 80 livres, soit moins de 2 livres par an pour trois personnes, le père et les deux fils, et ils ne l’ont pas fait ! Une vigne dont ils ont quand même retiré 42 récoltes... Or, notons-le, ni le marchand Barbara ni le prêtre Basset, pleins de bienveillance, ne leur ont réclamé un sou. Les héritiers en 1682, se chargent d’actionner les mauvais payeurs, car ils sont doublement héritiers, les Basset et les Barbara étant alliés.

 

Aussi François de Besse, « conseilleur du Roy Nostre Sire, Juge de Villelongue, garde du Grand Sceau de Beauvais au siège de Puylaurens », a-t-il jugé ce délai abusif. Devant cette clameur à lui exposée, il ordonne au premier sergent royal (huissier) « sans prendre viza ne parentis » de contrainte immédiatement les débiteurs au paiement par prise et saisie de leurs biens, « vente et délivrance d’iceux à l’enquand public au plus offrand et dernier enchérisseur », le 4 novembre 1682. La patience a des limites, et quarante-deux ans d’attente c’est faire preuve d’une belle patience.

 

*

 

 

 

Note : Voir Jean Escande : « Escoussens sous Louis XIV » in Sud-Tarn Tribune n°32-33, juin-juillet 1980. En 1790, cent ans après Jacques Basset, il y a encore un desservant à St Martin de Maziès : Jacques Selmes. Cambon-les-Lavaur compte alors 406 habitants et possède deux consuls.

 

 

 

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